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Mylène Lauzon, sur Heureux, Alright !

Par le Professeur A, 2008

Quand et comment l'idée d'écrire s'est-elle imposée à vous ?

Assez tard, après avoir fait des études en arts visuels et en littérature, en fait, au cours d'une formation en linguistique. C'est à ce moment que j'ai été en contact avec la matérialité de la langue et par conséquent eu la pulsion de m'engager dans un rapport avec elle, et écrire de la poésie.

Comment avez-vous découvert le travail de Thierry Van Hasselt ?

En passant devant une galerie mon regard a été happé par une toile... Une image de Thierry, un portrait de Gloria Lopez. Je suis donc rentrée chez moi avec son livre. Je l'ai réellement découvert en autopsiant cette œuvre dans le cadre d'un séminaire de recherche sur le récit en image l'année suivante, c'est à ce moment que je suis entrée dans les rouages de sa poétique.

Quand avez-vous pensé que votre écriture poétique pourrait rencontrer son univers ?

Mes directeurs de recherche m'ont trouvée assez culotée car, dès lors que je me suis mise à étudier l'œuvre de Thierry, je me suis mise à proposer des écritures différentes ; j'ai tout de suite vu et cru que ma façon de traiter la langue correspondait à sa façon à lui de traiter son médium et ses scénarios.

En plus de Heureux, Alright ! vous avez signé aux éditions du Quartanier un livre intitulé Holeulone, lui aussi né dans le cadre du projet de même nom.  Quel est pour vous le cœur de ce projet et qu'est-ce qui distingue ces deux livres ?

L'évidente distinction est que le dialogue entre le texte et les images se placent dans des lieux différents. Avec Heureux,Alright ! ils partagent le même espace, la page et le livre, et le même temps de réception pour le lecteur alors qu'avec Holeulone la rencontre s'est faite au cours du processus. Il y a toujours eu une forte entente esthétique entre Thierry et moi, et je crois que Holeulone s'est écrit sous l'influence certaine des images qu'à créées Thierry autant que de nos dialogues, or Holeulone est un livre de poésie où on ne retrouve aucune image, il ne sagit que d'une matière texte sous influence.

En quoi la collaboration avec un artiste graphique modifie-t-elle votre rapport à l'écriture ?

Comme l'espace est partagé avec l'image, je dois écrire forcément autrement puisque le texte ne porte pas tout le sens, il le délègue,il l'assume en alternance avec l'image. Ça, ça ne modifie pas vraiment mon rapport à l'écriture mais sa présence, ses qualités, ses forces d'effacement et d'impact. En fait de travailler avec un artiste comme Thierry m'amène à une conscience différente de mon médium. C'est fort riche puisque Thierry ne s'attend pas à ce que le texte que je lui propose assume par ailleurs autre chose que de la présence, de la tension, de l'état et du sensible ; on ne parle pas de modifier mon écriture pour qu'au final je doive écrire une histoire !

Quelle est la place de la transdisciplinarité dans votre travail ?

Fondamentale. J'écris en lien avec la danse et l'image depuis mes tous premiers textes. Mes textes se retrouvent dans un film, dans une chorégraphie ; je performe aussi des lectures (une toute autre discipline que d'écrire pour la publication). Il m'est vital de pouvoir penser et réaliser des projets où mon écriture et où la poésie doit travailler à son identité, à son identité puisqu'il est en rapport avec de l'autre ; quelles sont nos natures, nos fonctions ? Comment cohabiter ensemble ? Comment partager l'espace ? Partager des valeurs politico-esthétiques ? Fondamentale donc la transdisciplinartié dans ma pratique car elle permet des questionnements importants tant au niveau disciplinaire, sociétal et politique.

Vous êtes actuellement en résidence à l'Echangeur de Fère-en-tardenois en France. Quel est le projet auquel vous travaillez ?

À un livre qui interroge l'avant, le pendant et l'après de l'expérience chorégraphique. Après avoir écrit un recueil de poésie dont la poétique s'organisait autour du sensible et de la perception, j'ai eu envie de m'imposer des contraintes d'écriture pour questionner précisément mon rapport à la danse à la fois sur le mode de la réception et de la création.

Entretien avec Thierry Van Hasselt